La littérature économique fait désormais une large place à l’analyse des « motivations professionnelles », examinant notamment les possibles effets d’éviction entre motivations extrinsèques et intrinsèques. Le présent article propose des transposer ces questions dans le champ des professions de santé, avec l’enjeu d’un juste dimensionnement du recours aux politiques de paiement à la performance par le décideur public. Nous mobilisons un panel de 528 médecins généralistes libéraux de la région « Provence Alpes Côte d’Azur » en France et proposons une décomposition statistique interindividuelle entre motivations extrinsèques et intrinsèques dans le domaine des actions de prévention. La part des motivations intrinsèques est relativement plus importante chez les médecins pratiquant les tarifs conventionnés. L’effet significatif de l’âge suit une courbe en U qu’on peut interpréter comme le résultat d’un « cycle de vie des motivations médicales » ou comme celui d’un effet génération. Enfin, l’estimation économétrique établit une corrélation entre une faible part de motivation intrinsèque et le sentiment d’injustice concernant les réformes. La nature transversale des données ne permet pas de conclure quant au sens de la causalité, mais la relation mise en évidence semble bien alimenter la thèse selon laquelle la mise en place d’une politique basée
sur les incitations monétaires à la performance est jugée comme désobligeante et peut s’accompagner d’une érosion des motivations intrinsèques dans le travail médical.