L’Enquête Référence (2003) et les entretiens menés dans la commune rurale d’Ampitatafika (Madagascar) dans le cadre du programme 4D de l’IRD révèlent que les individus sont très soudés et solidaires au sein de la famille. Celle-ci est concernée par les relations sociales et économiques interindividuelles, les « liens forts » au sens de Granovetter (1973). La localisation explique en partie cette prépondérance puisque la plupart des résidents d’Ampitatafika se caractérisent par un niveau d’« enracinement » local très fort doublé d’une proximité géographique des membres d’une même famille. Proximités géographique et sociale s’impliquent mutuellement, au contraire de ce qui est observé dans une économie développée (Rallet et Torre 2004).
Une première question se pose alors : quelle est la part et le rôle des liens non familiaux dans le fonctionnement socio-économique de cette communauté rurale ?
D’autre part, il est un aspect du développement concerné au premier plan par le poids de la coutume et des traditions : l’innovation. Celle-ci implique, même à une échelle modeste, à la fois une prise de risque inhérente et une modification temporaire ou définitive des rapports interindividuels provoquée par les investissements, notamment en temps, induits par l’adoption de nouvelles techniques.
D’où les deux autres questions qui doivent être posées : la solidarité familiale représente-t-elle, face au besoin d’innovation, un atout ou une faiblesse ? Quels rôles les liens non familiaux jouent-ils dans la diffusion de connaissances, notamment en matière d’innovation agricole ?
La première section décrit quelques concepts théoriques attachés aux réseaux sociaux. Une deuxième section s’attache à préciser la notion de proximité interindividuelle telle qu’elle est révélée par l’Enquête Référence du programme 4D, en détaillant les concepts de famille, voisins et amis. La troisième section est consacrée au rôle des cérémonies dans le renforcement des liens, tandis que la quatrième s’intéresse aux mécanismes d’entraide et à la réciprocité qu’ils mettent en jeu. La dernière section, enfin, tente de définir la relation entre la nature des liens communautaires et la gestion du risque dans le cas de l’adoption d’une innovation.