The Conversation, 27/04/2020 - Auteure: Valérie Mignon
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Le 20 avril dernier, les investisseurs étaient prêts à payer pour se débarrasser de leurs contrats. William Potter / Shutterstock
Les prix du pétrole n’en finissent pas d’afficher des records historiques à la baisse, enregistrant une chute de plus de 75 % depuis le début de l’année 2020. Fait inédit, le prix du baril West Texas Intermediate (WTI) – le pétrole brut américain de référence – s’est même aventuré en territoire négatif, clôturant à près de – 40 dollars le 20 avril 2020. Qu’est-ce que cela signifie ? Comment expliquer une telle dynamique ?
La plupart des prix étant déterminés par la confrontation de l’offre et de la demande, analysons la situation dans ces deux dimensions afin de comprendre une telle évolution sur le marché pétrolier.
Du côté de la demande, celle-ci est en berne du fait d’une activité économique et de transports – secteur clé pour la consommation de pétrole – quasiment à l’arrêt dans la plupart des pays. La Chine fut la première touchée et son rôle dans la chute des prix du pétrole est primordial. Acteur majeur dans les importations mondiales de brut, la Chine représente en effet près de 15 % de la consommation totale et compte pour 75 % dans la croissance de la demande de pétrole.
Le confinement provoqué par la pandémie de coronavirus a commencé par faire tourner l’économie chinoise au ralenti, réduisant drastiquement ses besoins en hydrocarbures et entraînant une chute de ses importations de brut. Les conséquences se sont ensuite enchaînées en cascade.
La demande des autres pays asiatiques comme la Corée, l’Inde ou le Japon s’est effondrée, puis ce fut le cas en Europe, aux États-Unis, etc., qui se sont trouvés à leur tour confinés. Au total, le ralentissement économique mondial s’est accompagné d’une chute de la demande de brut, tirant naturellement le prix du baril vers le bas.
S’il semble à très court terme impossible, dans la configuration actuelle, de « jouer » sur la demande pour enrayer la chute des prix, l’un des leviers pourrait se trouver du côté de l’offre.
Or tel n’est pas le cas. En effet, rappelons que dès le début du mois de mars, les pays de l’OPEP+ – les 13 pays membres de l’OPEP et leurs 10 alliés – ont tenu un sommet durant lequel l’objectif de l’OPEP était de parvenir à un accord de réduction coordonnée de la production afin d’enrayer la chute des prix du brut. Mais celui-ci s’est soldé par un échec, la Russie s’étant opposée à un tel accord. Les tensions géopolitiques se sont alors ravivées, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis menaçant la Russie d’inonder les marchés mondiaux d’or noir à des prix bradés...